Jim Harrison – Poème du chalet
J’ai décidé de ne plus rien décider,
d’assumer le masque de l’eau,
de finir ma vie déguisé en rivière,
en tourbillon, de rejoindre à la nuit
le flot ample et doux, d’absorber le ciel,
d’avaler la chaleur et le froid, la lune
et les étoiles, de m’avaler moi-même
en un flot incessant.
*
Cabin Poem
I’ve decided to make up my mind
about nothing, to assume the water mask,
to finish my life disguised as a creek,
an eddy, joining at night the full,
sweet flow, to absorb the sky,
to swallow the heat and cold, the moon
and the stars, to swallow myself
in ceaseless flow.
***
Jim Harrison (né en 1937) – The Theory and Practice of Rivers (Winn, 1986) – Théorie et pratique des rivières (L’Incertain, 1994) – Traduit de l’américain par Pierre-François Gorse.
On ne décide pas d’aimer
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Encore un bijou. Comme dirait Bashung dans sa chanson « ma petite entreprise », « un trésor satiné, doré à souhait ». Merci
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Magnifique poème qui célèbre les épousailles de l’être et du paraître; volonté assumée de retrouver dans l’art du déguisement un peu d’insoutenable légèreté, avec tout au bout la profondeur extrême de la fusion.
Merci Mr Schabrières pour ce partage qui réveille en moi quelques pensées d’Héraclite, d’une autre façon cependant, si belle.
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Superbe – une découverte (Je ne connaissais pas) !
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« La profondeur extrême de la fusion », ça me fait penser à une poésie de Guillevic qui se conclue par ce mot « fusion ».
Que viens-tu faire, poème
Dans le royaume?
Je viens pour approfondir
Le silence,
Pour t’emmener au plus pur de lui,
Là où il te fait vivre
L’espérance que le monde
A de son avenir, là
Où il trouve
Ce que tu attends de lui et de toi :
La fusion.
Ça me fait penser aussi à une poésie de sainte Thérèse d’Avila
Toute entière, je me suis livrée et donnée
…
Il m’a tiré une flèche
Empourprée d’amour
Et mon âme transformée
Fut une avec son créateur
…
Ça me fait penser encore au poème « clown » de H Michaux ;
« Vider de l’abcès d’être quelqu’un, ….Je plongerai.
Sans bourse dans l’infini-esprit sous-jacent ouvert à tous, ouvert moi-même à une nouvelle et incroyable rosée. »
Là, Harisson parle d’une fusion avec la nature et lui-même. Il atteint cette état en décidant de ne plus décider, ce qui évoque un état d’abandon de soi-même que l’on retrouve chez sainte Thérèse « toute entière je me suis livrée et donnée » et ça finit aussi par une fusion « une avec son créateur », Guillevic parle d’approfondir le silence, ce qui fait penser aussi à un abandon, celui de ses mots, dans un autre de ses poèmes il parle aussi de pauvreté de sa chambre interieur, autrement dit de soi et cet abandon aboutit également à une fusion.
Et pour en finir avec les exemples de dénuement qui mène à une fusion, Michaux dans clown, dont l’abandon de soi lui permet de plonger dans » un infini espace sous-jacent ouvert à tous », »une incroyable rosée »
La fusion dont il est question à chaque fois ne peut-on pas l’appeler amour ?
Tout cela va peut être paraître d’une grande confusion mais j’ai envie de citer Jean Genêt, dans le condamnée à mort, « nous n’avions pas fini de nous parler d’amour ». Les poètes n’ont t-ils jamais fini de nous parler d’amour ?
Antigone, je ne sais faire les smileys, mais si je devais t’en choisir un, il aurait un large sourire.
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J’en reste à Héraclite, et à Jim Harrison.
Je ne crois qu’à la beauté de l’Amour.
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Oui, fusionner avec le monde jusqu’à atteindre le nirvana.
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J’ai pensé à la petite entreprise de Baschung, voici un lien vers une vidéo d’André Comte-Sponville, qui fut mon professeur de philosophie morale et politique: http://www.youtube.com/watch?v=ke3uullqOYM
Il y est aussi question de la motivation et du management dans les entreprises.
Il y a ce désir suprême qu’ont les femmes d’aujourd’hui de parler librement. Celles qui le peuvent se doivent de le faire pour toutes celles qui sont emmurées vivantes partout dans le monde.
Les femmes ne sont pas des enfants, en tant que telles, les sujets qui les préoccupent sont les mêmes que ceux des hommes adultes.
Tant pis pour l’obscurité, la lumière avance partout, elle n’est pas masquée, elle est âpre; l’ombre ne vient que des hommes qui manient très mal les concepts philosophiques, les vidant de leur sens pour en faire des instruments de pouvoir sur les femmes.
La liberté d’expression se gagne chaque jour, non sans quelques dommages collatéraux parfois. Tant pis, la liberté de l’esprit se poursuit, que cela plaise ou non.
Le virtuel est très en retard en France.
Pour Mr Schabrières: je pense aussi à la notion d’apeiron chez Anaximandre, illimité sans forme, à l’origine de tout et vers lequel tout retourne. Et nous pourrions aussi penser à Antiphon.
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Madame Guyon : « Elle tombe d’abîme en abîme, de précipice en précipice, jusqu’à ce qu’enfin elle tombe dans l’abîme de la mer, où perdant toute figure, elle ne se trouve plus jamais étant devenue la mer elle-même. »
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Dans la rubrique à la recherche de temps pas perdu au bord de l’eau ;
« J’honore la rivière qui laisse s’engouffrer dans son eau des journées entières sans qu’on ait l’impression de les avoir perdues. »
C’est de Stéphane Mallarmé qui n’était pas mal armé pour la poésie !
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[…] Vous pouvez lire une traduction de ce poème en suivant ce lien qui vous amènera sur le site « beauty will save the world ». Profitez-en pour découvrir ce blog qui regorge de pépites : https://schabrieres.wordpress.com/2013/10/29/jim-harrison-poeme-du-chalet-cabin-poem-1986/ […]
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Sur la route de Harrison – vivre en poete said this on avril 4, 2016 à 6:33 |