Dylan Thomas – Et la mort perdra son empire
Et la mort perdra son empire.
Les morts nus se confondront
Avec l’homme du vent et de la lune d’occident
Quand grattés jusqu’à l’os leurs os ne seront plus
Au coude ainsi qu’au pied ils auront les étoiles ;
Bien que déments ils seront sains d’esprit,
Naufragés d’eau profonde ils ressusciteront ;
Par delà les amants subsistera l’amour
Et la mort perdra son empire.
Et la mort perdra son empire.
Sous les méandres de la mer
Lents gisants, ils mourront sans ambages ;
Craquant au pilori quand cèdent les tendons,
Sous les coups de garcette ils ne fléchiront point ;
Entre leurs mains la foi aura beau se briser
Et la licorne du mal les percer d’outre en outre ;
Fendus par tous les bouts mais sans fêlure demeurés ;
Et la mort perdra son empire.
Et la mort perdra son empire.
Les mouettes auront beau ne plus frapper leur oreille de cris
Ou les vagues se briser tumultueuses sur les rivages ;
C’est en vain qu’aux lieux où s’épanouit une fleur
Nulle autre fleur n’offrira plus son chef aux coups de la pluie ;
Même déments et morts comme des souches,
Parmi les pâquerettes leurs personnages se fraieront un passage obstiné ;
Le soleil, domptez-le jusqu’à ce qu’il baisse pavillon,
Et la mort perdra son empire.
*
And death shall have no dominion.
Dead men naked they shall be one
With the man in the wind and the west moon;
When their bones are picked clean and the clean bones gone,
They shall have stars at elbow and foot;
Though they go mad they shall be sane,
Though they sink through the sea they shall rise again;
Though lovers be lost love shall not;
And death shall have no dominion.
And death shall have no dominion.
Under the windings of the sea
They lying long shall not die windily;
Twisting on racks when sinews give way,
Strapped to a wheel, yet they shall not break;
Faith in their hands shall snap in two,
And the unicorn evils run them through;
Split all ends up they shan’t crack;
And death shall have no dominion.
And death shall have no dominion.
No more may gulls cry at their ears
Or waves break loud on the seashores;
Where blew a flower may a flower no more
Lift its head to the blows of the rain;
Though they be mad and dead as nails,
Heads of the characters hammer through daisies;
Break in the sun till the sun breaks down,
And death shall have no dominion.
1933
***
Dylan Thomas (1914-1953) – Traduit de l’anglais par Armand Guibert.
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