Rainer Maria Rilke – Respirer, invisible poème… (1922)
Respirer, invisible poème.
Toujours autour de moi,
d’espace pur échange. Contrepoids
où rythmiquement m’accomplit mon haleine.
Unique vague dont je sois
la mer progressive ;
plus économe de toutes les mers possibles, —
gain d’espace.
Combien de ces lieux innombrables
étaient déjà en moi ? Maints vents
sont comme mon fils.
Me reconnais-tu, air, encore plein de lieux miens tantôt ?
Toi qui fus l’écorce lisse,
la courbe et la feuille de mes mots.
***
Rainer Maria Rilke (1875-1926) – Sonnets à Orphée (1922) – Traduit de l’allemand par Maurice Betz
Poème magnifique
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La revue de Claire said this on avril 27, 2016 à 3:46 |
[…] via Rainer Maria Rilke – Respirer, invisible poème… (1922) — BEAUTY WILL SAVE THE WORLD […]
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Rainer Maria Rilke – Respirer, invisible poème… (1922) — BEAUTY WILL SAVE THE WORLD – musnadjia423wordpress said this on avril 27, 2016 à 4:26 |
If I live I breathe… My eyes inspire… I feel through you…
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pranavahimaging said this on Mai 18, 2016 à 9:17 |
Atmen, du unsichtbares Gedicht!
Immerfort um das eigne
Sein rein eingetauschter Weltraum. Gegengewicht,
in dem ich mich rhythmisch ereigne.
Einzige Welle, deren
allmähliches Meer ich bin;
sparsamstes du von allen möglichen Meeren, –
Raumgewinn.
Wieviele von diesen Stellen der Raume waren schon
innen in mir. Manche Winde
sind wie mein Sohn.
Erkennst du mich, Luft, du, voll noch einst meiniger Orte?
Du, einmal glatte Rinde,
Rundung und Blatt meiner Worte.
Souffle, toi invisible poème!
Pur espac’-monde d’échange sans fin
pour l’Etre-en-soi, et contre-poids dans lequel à moi-même
c’est par le rythme que j’adviens.
Ô vague unique, toi dont la mer
toujours recommencée je suis;
toi, de toutes les mers possibles, la moins dépensière, –
Espace conquis.
Combien d’entre ces lieux de l’espace ont été au-dedans
de moi déjà! Comme mon fils
sont bien des vents.
Air, me reconnais-tu, toi plein encore d’endroits qui fur’nt miens un jour?
Toi, jadis écorce lisse,
galbe et feuille de mon discours.
Breathing, unseen poem, O great
and pure world-space continually
exchanging, pursuing true Being. O counter-weight
in which I happen rhythmically.
O unique wave, that on the tidal
flow of my own sea does race;
you, of all possible seas the most frugal, –
O conquered space!
How many of those realms of space have by now gone
deep inside me! Many a wind
is like my son.
Do you recognize me, air, you, still full of my old places?
You, who once have been smooth rind,
roundure and leaf of my phrases.
Trauctions : Claude Neuman (Les Sonnets à Orphée / The Sonnets to Orpheus, édition trilingue, Ressouvenances, 2017)
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claudeneuman said this on janvier 10, 2019 à 5:06 |